La vie passée: promenade à minuit

Parce que même si mes grands-parents ont commencé à cultiver en bio en 1970, nous sommes loin d’être parfait, et manquons de cohérence dans certains faits, car, oui, nous avons préféré notre confort et rêvé à l’absence de pénibilité dans notre travail…

Et moi, Céline, je m’interroge sur le parcours fait en trois générations. De l’Ancêtre, mon grand-père, en passant par le Grand Chef, mon père, à moi, voici quelques différences de vie…

 

Comme l’heure… ben oui, dans le temps, nous vivions à l’heure du soleil. Comme les poules (encore que maintenant, tout comme nous, nous leur mettons de la lumière pour qu’elles pondent plus !!)

Nous avons, l’été, 2h d’avance sur le soleil. Donc quand l’Ancêtre nous dit qu’il était au turbin à 3h, c’est comme aujourd’hui, sauf que notre montre n’indique que 5h…

Ce temps béni où nous pouvions faire semblant de ne plus rien voir pour arrêter de travailler (et encore heureux que nous n’avons pas de lampe frontale pour l’hiver !). Imaginez… ici, nous arrêtons vers 17h de couper la mâche en décembre/janvier, sinon il y aura plus de jaune que de vert dans la caisse (et nous nous sommes vus finir à la lumière du portable !), mais à l’époque : fini à 16h…

Bon d’accord, il y a des trucs qui malgré tout, n’était pas top… L’exemple de l’arrosage : interdiction d’arroser en journée en plein cagnard. Donc l’Ancêtre a de supers souvenirs avec l’arrosoir, son père et l’église qui sonne minuit. Aller/retour au point d’eau pour sauver de la sécheresse leur hectare de cultures (j’arrête tout de suite ceux qui fantasment sur ce concept, car il est clair que je préfère acheter mes légumes à un autre maraîcher plutôt que d’y passer mes nuits)

Le cadre devait être idyllique : un croissant de lune, une chouette qui hulule, le crissement des savates sur la terre sèche, le père et le fils seuls au monde à arroser leur hectare. Le chuchotement des parcelles voisines. Un univers hors du temps. Une carte postale. Un imaginaire.

Mais derrière cela, il n’y avait pas qu’une nuit, mais tout un été. Il y avait aussi 20 kilos d’eau à se traîner. Arrosoir après arrosoir. Un adolescent de 14 ans qui commençait sa vie active.

Peut-on imaginer la pénibilité de cette vie ? Pourrions-nous le faire ? Demander à nos enfants en 4e de travailler autant ? Je ne sais pas… nous avons souvent l’impression que le passé nous rendait plus libre. Mais n’est-ce pas nous qui dessinons notre futur ?

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