La vie passée: la pression immobilière

Parce que même si mes grands-parents ont commencé à cultiver en bio en 1970, nous sommes loin d’être parfait, et manquons de cohérence dans certains faits, car, oui, nous avons préféré notre confort et rêvé à l’absence de pénibilité dans notre travail…

Et moi, Céline, je m’interroge sur le parcours fait en trois générations. De l’Ancêtre, mon grand-père, en passant par le Grand Chef, mon père, à moi, voici quelques différences de vie…

 

Comme notre lieu de vie.

Personnellement, je n’ai bougé que de 300m en 40 ans… car il est bien connu qu’un agriculteur se masturbe au travail (si, si, tendez bien l’oreille, et vous entendrez ce moment où il adore dire à quel point il travaille 15h/jour…)

Mais mes grands-parents vivaient dans une maison de ville, derrière l’église du Mesnil-le-Roi, sans jardin et 3 générations sous le même toit. Rien à voir avec St Rémy… qui est la carte postale de la campagne.

Cultiver les légumes près des citadins. Utilisez les coteaux sud pour les fruitiers. Mais l’urbanisme a préféré les immeubles aux arbres et laissé les terres inondables ou pauvres aux maraîchers, les expropriant des belles terres de façon peu élégante.

L’Ancêtre s’est retrouvé entre 1660 et 1970 amputé de ses meilleures terres et une indemnisation frisant l’indécence (il avait d’ailleurs gardé sa carte d’électeur au Mesnil, espérant que sa voix dégage le Maire en place !).

Le choix était : soit de devenir revendeur pour rester au Mesnil près de la famille et de leurs amis, gardant un confort de vie.

Soit de partir pour Fontainebleau et devoir tout recommencer du début à plus de 40 ans.

Soit de venir à St Rémy, pas plus riche qu’à Fontainebleau mais pouvant garder le marché de Maisons-Laffitte qui était à 1h30 à l’époque de St Rémy.

L’Ancêtre a préféré conserver son métier de cultivateur. Il a donc pris sa belle-mère, sa femme, sa fille de 13ans et son petit-fils tout juste né car ma tante n’avait qu’une fibre maternelle très relative pour venir s’ancrer ici. Ma grand-mère répétait toujours qu’ils étaient arrivés avec des dettes et une montagne de travail devant eux. Elle n’a pas pu s’acheter un vêtement les deux premières années. Je ne les ai jamais entendu dire qu’ils regrettaient, ni que c’était trop dur. Ma mère a détesté le Belair, collège privé catholique où les bonnes sœurs prenaient la série Angélique Marquise des Anges pour Satan et a repris le travail de ses parents dès ses 16 ans en s’orientant sur l’horticulture, parsemant le champ de tâches colorées.

Et à mes 15 ans, les Ancêtres regardaient les terres agricoles autour de nous se faire avaler par les citadins soucieux de leur qualité de vie, car les prix flambaient en ville, et les retraites paysannes, trop chiches. Sans parler de l’image négative de travailler dans le secteur primaire. Bref, cela semblait convenir à tous : de l’espace moins cher qu’en ville pour ces nouveaux actifs, une retraite assurée pour ces anciens paysans dont les enfants ont fui la terre. Seuls les anciens habitants des villages n’aimaient pas voir leur environnement changer, et aussi les derniers arrivés car ils avaient acheté pour la vue et le calme (sans les coqs quand même !). La même chose se jouait qu’à Maisons Laffitte 30 ans et 40km plus loin. Nous voyons les zones industrielles s’élargir sur les terres agricoles. Un peu moins les maisons qui poussent sur le moindre espace entre deux anciennes. Aucune idée où cela finira. Aucune idée de ce que sera le monde paysan demain.

Mais à côté de chez nous, quelques enfants de paysans attendent en laissant chardons et autres pousser que la ville gagne et assure leurs vieux jours sur la sueur de leurs ancêtres…

De notre côté, il nous reste la moitié de notre vie à savoir si nous obligerons nos enfants à poursuivre ou si nous rêverons à de jolis pièces d’or…

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